Hollow Knight: Silksong était attendu avec impatience par les fans après le succès de son prédécesseur. Et pourtant il en aura fallu de la patience puisqu’il aura fallu attendre 6 ans ! Et dans la communauté des joueuses et joueurs en situation de handicap, on avait surtout l’espoir qu’ils auraient amélioré son accessibilité.

Type | Aventure Action |
Editeur | Team Cherry |
Développeur | Team Cherry |
Date de sortie | 4 septembre 2025 |
Classification | 7 ans et plus |
Moteur | Visuel | Auditif | Cognitif |
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En effet, Hollow Knight premier du nom est devenu un jeu culte au fil des années parmi les jeux Metroidvania. C’est un style de jeu de plateforme-aventure très apprécié parmi lesquels on peut compter Céleste, Hadès et d’autres perles.
Je ne cite pas ces deux titres au hasard. En effet, le style Metroidvania est un style réputé exigeant, basé sur l’adresse et les réflexes. Pourtant Céleste et Prince of Persia Lost Crown – récompensé en début d’année par le Pégase de l’accessibilité – ont su allier exigence et accessibilité. On était donc aussi impatients !


Vous incarnez Hornet, une jeune araignée guerrière, héroïne du premier jeu. Elle est enlevée de Hollownest, vers une nouvelle région, Pharloom. Suite à un accident qui la libère, elle démarre alors une longue route vers la Grande Citadelle pour en découvrir la raison.
On est donc sur un jeu de plateforme aventure, qui se découpe en de nombreuses régions. En effet, la carte est immense. Chaque région est découpée en tableau rempli de créatures agressives. Armé de votre épée, vous allez devoir apprendre leur façon d’agir pour bien les gérer. Certains sautent, d’autres tirent et d’autres enfin chargent vers vous. Plus vous avancez, plus ils sont complexes et plus ils vous demandent d’utiliser les compétences que vous débloquerez en avançant.
Certains tableaux vous obligeront à affronter un boss. Ils sont résistants et ils suivent des phases d’action qui s’enchaînent. Ils sont souvent aidés par des alliés ou ce sont des petites créatures qui arrivent par vagues. Ces tableaux sont assez longs et demandent une bonne mémoire et de l’anticipation des phases d’action. À force de mourir, on retient comment le boss agit et on progresse.


Vous gagnerez de nouveaux pouvoirs et de nouveaux objets qui vous permettront d’accéder à de nouvelles zones d’anciens tableaux qui jusque là étaient inaccessibles. Il faut donc se souvenir de ses zones et ce n’est pas facile vu la taille de la carte. D’ailleurs, cette carte n’est pas automatique. Vous devrez les acheter, zone par zone, à des marchands dispersés. Donc quand on découvre une nouvelle zone, on doit l’explorer sans repères.
Silksong est donc sur le papier, un jeu très exigeant. Et pour que tous puissent y jouer, on attend donc des aides pour compenser au moins la difficulté liée à votre handicap. Et soyons clairs, Silksong offre bien peu de soutien à ce niveau. On regarde tout ça ensemble.
Et si j’ai un handicap moteur ? 4,5 / 10
Donc, on le sait, le jeu va être très difficile sur le plan moteur. Les ennemis sont rapides. Vous devez sauter au millimètre près pour atteindre certaines plateformes. C’est ce qui fait tout le sel de ce type de jeu.
En soi, le jeu n’est pas gourmand en action. Vous avez besoin de 8 touches, sans avoir besoin de faire trop de combinaisons. Il y a peu de maintiens de touches pour ce que j’en ai vu. Le gros problème, c’est que rien ne vient alléger le besoin de précision et de réflexes.



En effet, ça commence par la prise en main. Les 8 touches sont les 4 boutons et les 4 touches arrière : gâchettes et boutons L/R. Inquiets, nous sommes allés voir les options et on a trouvé un réglage des commandes ! Mais on a vite été déçu : vous pouvez réattribuer les touches… entre elles. On ne peut pas attribuer les fonctions des touches arrière sur les boutons directionnels par exemple. Cela aurait permis d’avoir tout sur l’avant de la manette. Avec cette méthode de basculement entre les touches, cela veut dire que vous devrez forcément utiliser les touches arrière.
Pour les joysticks, comme on est sur un environnement en fausse 3D, vous avez le joystick de direction et celui de caméra qui sert surtout à abaisser ou lever la caméra pour afficher ce qui se cache en dessous. Ça permet de voir qu’un trou est plus ou moins profond, et s’il y a des plateformes pour se rattraper. Mais dans les options, aucun réglage de sensibilité de ces joysticks. Par contre, les touches directionnelles peuvent remplacer les joysticks : gauche et droite permettent de se déplacer, haut et bas bougent la caméra.


Donc il y a peu de gestion des touches et pas de sensibilité : ça part mal. Malheureusement, l’absence d’aide sur le gameplay va venir aggraver cette difficulté sur les contrôles. Le jeu ne permet pas de réduire la difficulté, le nombre d’adversaires ou le nombre d’appuis ou la précision dans les déplacements.
Silksong sera donc difficilement accessible aux joueurs ayant des troubles moteurs.
Et si j’ai un handicap visuel ? 4 / 10
Lorsque vous percevez moins les informations visuelles, il est important de pouvoir compter sur les sons. Ils vous transmettent l’information qui vous manque.
Dans Silksong, le combat prend une part importante. Entre les créatures des différents tableaux et les boss, les combats seront nombreux. Les options vous permettent d’enlever la musique et éventuellement les voix de votre personnage pour ne vous concentrer que sur les sons utiles.


Chaque créature a un comportement fixe et un son associé. Tel ennemi crie avant de sauter. Le second boss fait un bruit différent suivant qu’il se prépare à vous charger ou à sauter. C’est un très bon point, car ça permet d’anticiper les phases de combat. Cependant, cela a quelques limites. En jouant avec un casque, la position de l’ennemi est spatialisée. On sait approximativement où l’ennemi est, mais pas toujours avec précision si c’est à votre étage ou à celui du dessous. En combat de boss, c’est encore moins évident entre l’écho et le son plus englobant.
Mais là où ça deviendra injouable, c’est sur l’exploration. En effet, il n’y a pas de son de collision, pas de son quand on passe à côté d’une interaction, comme des perles à ramasser ou une manette d’activation. Et bien entendu, pas de son lorsqu’on est en bord de plateforme. Donc se pour se déplacer dans l’environnement, sombre et pas toujours contrasté, vous ne dépendrez que de votre vision.


D’autant plus que côté couleur, vous n’avez aucun contrôle. On peut agrandir l’interface qui est essentiellement blanche. Dans un environnement sombre, c’est très bien. Par contre, la distinction des ennemis est plus tendue pour certains. Un trait noir les entoure et les contraste un peu, mais il aurait fallu pouvoir en choisir la couleur. Et on ne parle pas des éléments volontairement rendus peu visibles, comme les passages secrets ou les ressources supplémentaires.
Comme il n’y a pas de voix française, les écrits sont importants. Vous ne pouvez rien modifier sur la police de texte, mais la plupart des textes de discussion sont en blanc dans des grandes bulles noires et vous en contrôlez le rythme.
Cela fait beaucoup de contraintes et peu d’aide pour pallier les difficultés. Nous ne recommanderons pas SilkSong sans avoir vérifié par des vidéos que le niveau de contraste et de couleur par défaut vous convient.
Et si j’ai un handicap auditif ? 6 / 10
Sur l’aspect auditif, nos points de vigilance portent sur les informations qu’on ne voit pas. Et là où on a trouvé intéressant le design sonore des ennemis pour l’aspect visuel, l’absence de correspondance visuelle va poser problème ici.
On l’a dit, les ennemis font du bruit spatialisé. Cela vous prévient de leur présence et de leur position approximative. Si vous ne percevez pas ces sons, vous perdez donc une information importante qui n’est pas compensée par une aide vous permettant de savoir où sont les ennemis hors du champ visuel.
C’est la même chose en combat de boss. Sur le second dont je parlais plus haut, on voit la poussière au sol annonçant qu’il va refaire surface. Mais le son vous annonce ce qu’il va faire. S’il grogne pendant qu’il refait surface, c’est qu’il va faire un saut et donc vous devez attendre au sol. Sinon, c’est qu’il va charger et dans ce cas il faut sauter au-dessus de lui. Sans le bruit, vous savez par la poussière qu’il arrive, mais pas ce qu’il va faire. Cela peut donc vous gêner.



Si vous percevez mal ces sons, vous allez pouvoir les isoler. Les options permettent de couper la musique et vos propres sons pour n’entendre que ceux de l’ennemi. Ça peut aider à renforcer ces sons.
Par contre, pas d’option de son “Mono”. Les sons étant spatialisés, vous risquez d’en perdre certains avec une surdité latérale.
Pour les discussions avec les personnages. Ce n’est que dans des zones précises et en direct un pour un. Les textes s’affichent dans de grandes bulles bien contrastées avec un logo dans l’interface montrant que c’est vous, ou l’autre personnage, qui parlez. Ça manque d’information, de contexte et on ne peut pas modifier le texte, mais cela reste opérationnel.
Et si j’ai un handicap cognitif ? 4 / 10
En soit, Hollow Knight Silksong n’est pas un jeu complexe. C’est un jeu de plateforme et d’exploration. Sur le plan cognitif, on va donc devoir s’assurer que l’apprentissage est progressif et qu’on va pouvoir s’adapter à sa capacité à gérer l’information.
Sur l’apprentissage, on comprend vite que le problème va être de se souvenir de ce que vous pouvez faire. On vous explique une action au moment où vous la rencontrez pour la première fois, mais on ne retrouve pas l’information dans un didacticiel. L’information est dispersée dans les différents tableaux de votre personnage, comme les objets portés.


Dans l’interface, votre vie est bien identifiée par les visages, la bobine se remplit visuellement et brille quand on peut se soigner. Ça, tout le monde a bien intégré dans l’équipe. Sur la disponibilité des compétences comme la lance, une icône est présente en permanence sous la barre de vie, grisée ou brillante. C’est clair, mais placé dans un coin de l’écran, donc certains vont ignorer l’information et oublier de les utiliser.
Ensuite, les nombreux combats avec la moindre créature vont dépendre de votre capacité à analyser son comportement. Comme ce sera toujours le même, la stratégie pour le vaincre sera la même, il faut la répéter. Mais quand on a un trouble de l’attention ou du mal à faire ce travail d’analyse, cela devient vite un problème. Nos champions du rush en ont payé le prix : une pensée pour Joël et Steven qui ont tendance à charger l’ennemi en frontal ! Et si vous ne pouvez pas gérer cet aspect de “stratégie de combat”, le jeu devient vite punitif.
On meurt donc souvent. Ce ne serait pas un problème si la mort n’était pas aussi problématique. Lorsqu’on meurt, on perd ses ressources qui restent là où vous êtes mort sous forme d’un cocon. Or, quand on meurt, vous revenez au dernier banc sur lequel vous vous êtes assis. C’est le point de sauvegarde. Et ça peut être à l’autre bout de la zone !
Refaire tout le chemin est acceptable quand vous avez fait une erreur dans le combat et l’avez intégré pour ne plus la refaire. Au pire c’est quelques aller-retour pour passer le boss. Mais quand on ne peut pas intégrer ses erreurs, les aller-retour deviennent une vraie galère frustrante.



D’autant plus qu’il faut retrouver son chemin et savoir où aller. Le principe d’un jeu comme Silksong, c’est d’avoir une carte énorme à explorer et de se souvenir par où passer. En effet, avoir une carte détaillée consultable à tout moment, c’est rare ! Il faut trouver le vendeur de cartes, avoir les ressources pour acheter celle de votre zone, avoir de quoi acheter les épingles pour les informations utiles (banc, gare…) y compris votre propre position.
Avant d’avoir tout ça et de comprendre comment l’utiliser, j’ai perdu une bonne partie de notre groupe de testeurs !


Donc on a un jeu exigeant, basé sur la technique puisque chaque saut est une épreuve. Il est aussi basé sur la stratégie et la capacité à mémoriser les choses : les techniques de chaque ennemi, le trajet à suivre, les quêtes à faire… Or Silksong ne vous permet pas de gérer ces aspects en réglant la difficulté, votre résistance ou en vous aidant à savoir où aller.
De plus, Silksong n’est pas en voix française. C’est immersif, après tout, vous êtes un insecte parmi les insectes, donc les échanges sont dans une langue inventée et musicale. Mais ça veut dire que toute l’information passe par l’écrit. On en contrôle le rythme de défilement, les discussions sont dans des temps calmes et sans danger. Mais si vous n’avez pas accès à la lecture, sans lecteur d’écran, vous n’aurez aucune information utile.
Notre avis
HollowKnight Silksong nous laisse donc le sentiment qu’il vous impose un haut niveau de maîtrise : de votre motricité, de votre capacité à analyser, de votre mémoire. Et sans vous proposer de personnalisation, c’est soit vous l’atteignez, soit vous passez le chemin.
“Oui, mais c’est le style de jeu qui veut ça”. Peut-être, et pourtant des jeux comme “Céleste” qui sont sur exactement le même modèle, ont des aides progressives jusqu’à l’invincibilité. Dans les deux cas, tout le monde peut se vanter de l’avoir terminé en mode normal et se battre pour le meilleur temps en speedrun. Mais dans Silksong, beaucoup de joueurs et joueuses ne pourront même pas y jouer. C’est dommage parce que c’est effectivement un beau jeu.